14 septembre 2016

Dans la tête d'une anorexique

Avant toute chose, je veux préciser que je n’écris pas cet article pour que l’on s’apitoie sur moi. Si je fais un article sur l’anorexie, c’est certe pour parler de ce que j’ai vécu, mais surtout pour expliquer comment ca se passe, ce que ça fait, d’être anorexique. Parce que beaucoup de gens ne le comprennent pas, et en fait je pense que ce n’est pas possible, sans l’avoir vécu soi même.
Mais j’espère tout de même que cet article vous aidera à comprendre cette maladie, vous aidera à aider vos proches potentiellement touchés par l’anorexie, ou vous aidera à ne pas tomber dans ce cercle vicieux.

Je pense qu’il est important de définir l’anorexie avant de débuter cet article. 

L’anorexie est un TCA,  c’est un dire à trouble des conduites alimentaires.
Les TCA regroupent aussi d’autres maladies comme l’obésité, ou encore la boulimie qui est souvent confondue avec l’anorexie.

En soit, l’anorexie est la perte de l’appétit. Mais c’est avant tout une maladie mentale, qui entraine des restrictions de nourriture importantes, et une préoccupation du physique maladive.  

 La boulimie quand à elle, se caractérise par des crises pendant lesquelles la personne absorbe une quantité très importante de nourriture.
On parle parfois de boulimie vomitive lorsque la personne se fait vomir après avoir fait une crise.

Pour beaucoup de gens, pour soigner l’anorexie, il suffit de manger… Il se trouve que c’est un peu plus complexe que ça.
En fait, quand on est anorexique -en tout cas c’est vraiment comme ça que je l’ai vécu- on devient schizophrène, et lorsque l’on veut manger, on a une autre partie de nous qui refuse d’avaler quoi que ce soit. C’est pour ça que c’est très difficile de s’en sortir, on le veut sans le vouloir. C’est également ce qui fait que les gens ne comprennent pas ce que c’est, d’être anorexique. Il faut réellement se battre contre soi même, et c’est vraiment flippant cette sensation de devenir fou.

Beaucoup d’anorexiques, et j’en ai fait parti, aiment être malade, dans le fond. On a la satisfaction d’entrer dans des vêtements de petite taille (32/34, ou XS), et surtout, on contrôle quelque chose que beaucoup de gens ont du mal à contrôler : notre poids. On sait exactement quoi manger pour en perdre d’avantage, et quoi éviter pour ne pas en gagner. On mesure absolument toutes les calories contenues dans chaque ingrédient, et ce sentiment de contrôle est assez jouissif.

Mais l’anorexie est une maladie à la fois mentale et physique, qui entraine forcément de nombreuses complications.
L’anorexie est très souvent liée à la dépression. Soit l’anorexie commence et amène la dépression –ce fut mon cas, soit la dépression cause une perte de l’appétit qui s’aggrave et se transforme en anorexie.  On a plus aucun goût à la vie, on ne veut plus rien faire pour profiter. On s’éteint totalement.
L’anorexie est le trouble psychiatrique causant le plus haut taux de suicide, ça vous laisse imaginer à quel point on se sent mal dans ce cas là.
Avec la dépression suivent les crises d’angoisse. Comme dit précédemment, il est jouissif pour l’anorexique de contrôler son poids, mais tout ce que la/le malade ne peut pas contrôler le fait paniquer. Il faut toujours que tout soit planifié, et si il y a le moindre imprévu ça peut très rapidement déraper, partir en cris et en larmes.
Le malade devient très irritable, se met en colère facilement, n’a plus aucun sens de l’humour.

Paradoxalement, l’anorexie, c’est aussi la quête de la perfection. Premièrement physique, parce que tout ce qui est mince, voire maigre, est considéré comme beau (du point de vue de l’anorexique) ; mais aussi mental. Pour ne plus penser au fait que j’allais devoir manger, ou à la faim, je me suis renfermée sur le travail, au point ou je ne faisais plus rien d’autre, je n’avais plus de vie sociale, j’ai absolument tout perdu, j’étais toute seule… Mais j’étais dans les premiers de classe.

Il y a également de nombreuses complications physiques. Du fait de la sous-alimentation, le corps se fatigue très vite et le malade est très faible. Cela peut entrainer un ralentissement de la fréquence cardiaque, en ce qui me concerne j’étais a 40 battements par minute (normalement la fréquence cardiaque est comprise entre 60 et 80 battements pas minute). Par moment j’avais l’impression que je sentais mon cœur ralentir jusqu’à ce qu’il s’arrête, c’était vraiment une sensation étrange.  On se sent vraiment mourir, on s’éteint, encore une fois.

Le fait d’affaiblir son corps l’abime forcément. On perd ses cheveux –en quantité assez importante, et les ongles ne sont pas résistants.  En ayant la peau sur les os, on a tout le temps froid (surtout les mains et les pieds).
L’anorexie a aussi des effets important sur l’intérieur du corps et abime les organes, et il est courant que les règles s’arrêtent, on peut avoir des problèmes de cholestérol, ce genre de choses.
La boulimie peut également entrainer d’important problème au niveau du système digestif, notamment à l’œsophage et à l’estomac.
Le corps étant faible, il se défend moins bien des virus, et risque donc de tomber malade plus facilement. 



Ce qui cause l’anorexie :

Il n’y a pas de schéma précis pour l’anorexie, il peut y avoir toute sorte de facteurs. La dépression, comme dit précédemment, peut entrainer une perte d’appétit. Cela peut être à cause de problèmes familiaux, ou de choc émotionnel important. L’anorexie peut également être causée par des remarques répétées, une perte de confiance en soi

Comment soigner l’anorexie : 

Il faut bien évidemment être suivi par des médecins, des psychologues, et être entouré, soutenu. Mais il n’y a malheureusement pas de méthode miracle pour guérir. Je pense que le malade doit vraiment avoir une volonté de s’en sortir, mais on le peut pas le forcer, et les médecins, traitements, et proches ne sont malheureusement pas suffisant.

La difficulté majeure pour soigner l’anorexie, est souvent que le malade ne se rend pas réellement compte de sa maladie, ou en tout cas de la gravité de sa maladie. De plus, l’image que le malade à de lui même est déformée –on se voit plus gros qu’on ne l’est vraiment, ce qui n’aide pas a se rendre compte de la gravité de la situation.

Il faut aussi savoir que l’on ne guérit pas a 100% de l’anorexie. A partir du moment ou ça nous a touché, on peut retomber dedans à tout moment. Il n’y a que 30% à 40% de guérisons après 4 ans de traitement. Plus la maladie est prise en charge tôt, plus il est facile de la soigner. Mais il est possible que la malade survienne de nouveau après des dizaines d’années, pour diverses raisons.

En France, on compte environs 250.000 personnes touchées par l’anorexieCe sont majoritairement des femmes (94% à 97% des anorexiques), de 15 à 30 ans.
Mais il ne faut pas délaisser les hommes touchés par cette maladie pour autant. Ils sont certe plus rares, mais l’anorexie masculine est bien souvent plus grave que chez les femmes : il est plus difficile pour l’entourage de détecter la maladie, la perte de poids est généralement beaucoup plus importante.

Alors voilà, non, l’anorexie ce n’est pas simplement une maladie d’adolescente qui veut perdre un peu de poids. Non, ce n’est pas non plus qu’elle veut qu’on s’occupe d’elle. Et non, il ne suffit pas de manger un peu pour s’en sortir.
C’est vraiment quelque chose de sérieux et de dangereux. Alors s’il vous plait, soyez attentif à vos proches, soyez là pour eux –même si c’est dur- parce qu’ils en ont vraiment besoin ; et surtout, faites attention à vous.

6 commentaires:

  1. Bravo à toi d'avoir partagé ton histoire, et surtout merci d'en parler. On en parle pas encore assez à mon goût, même si les gens commencent à réaliser que l'anorexie n'est pas juste un "problème d'ado", je trouve qu'on insiste pas encore assez sur le fait que c'est un problème mental avant tout (comme tu l'as si bien expliqué).
    Je suis vraiment heureuse que tu t'en sois sortie, même si comme tu l'as dit, on n'en guéri jamais totalement.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci beaucoup Julie, c'est trop gentil ! Mais oui je trouve qu'il n'y a pas assez de gens qui comprennent ce que c'est, et ca m'énervais quand j'étais encore malade, donc voila je voulais partager ca pour que les gens réalisent ce que ça fait d'être anorexique, que c'est pas juste que tu veux être chiante et ne pas manger... Et voila je reçois plein de messages géniaux depuis tout à l'heure et ca me touche trop, donc merci à toi aussi ❤️❤️❤️

      Supprimer
  2. Hésite pas a insister surtout sur le coté "comment s'en sortir" et "comment se rendre compte que ses proches sont touchés."
    genre l'histoire de la bouffe tres chaude, c'est pas un des symptome ?

    Et surtout beaucoup insister pour dire que si jamais on a des doutes sur un proches, il faut aller lui parler le plus tôt possible, puisque plus on attend, et plus les risques sont elevés ?
    je sais que tu l'as dit, mais je pense qu'il faut pas hésiter a vraiment inister, c'est le plus important au final

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui peut être parler un peu des "Symptômes" ca peut être bien parce que c'est quand même spécial

      Supprimer
  3. Charlotte Bonnefoy5 février 2017 à 13:42

    On est tellement barjos.. Je m'en rappelle aussi, il y a deux ans j'étais encore dans cette spirale de merde. Mais, et là tu as 100% raison, la maladie ne part pas, on la contrôle. Et on oublie peu à peu certains toc, mais je sais que personnellement je refuse de manger beaucoup, j'ai du mal à me voir prendre du poids, et on a tellement de traces qui restent; dents, cheveux, mains/pieds froids...
    Bel article dans tous les cas, ça fait plaisir en quelque sorte de voir qu'on a vécues le même ressenti.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui je m'en rend de plus en plus compte, la maladie revient assez souvent, faire des petits "coucou, je suis toujours là!", et je ne m'étais pas vraiment rendu compte de ça en écrivant cet article, ma """guérison""" devait être trop récente...
      Merci beaucoup pour ton commentaire, ça me fait du bien aussi d'en parler !

      Supprimer